jeudi 23 février 2012

Apple propose un voyage au cœur de ses usines chinoises pour redorer son blason


Apple propose un voyage au cœur de ses usines chinoises pour redorer son blason

ABC diffuse ce mardi aux États-Unis un reportage sur les usines chinoises où sont construits les iPhone et les iPad. Une opération d'Apple pour redorer son image égratignée par des rapports sur les conditions de travail de ses ouvriers chinois.

Par Sébastian SEI
 
“Apple a vendu 17 millions d’ordinateurs, 38 millions d’iPod, 40 millions d’iPad et 93 millions d’iPhone en 2011, mais personne n’a jamais vu à quoi ressemblait de l’intérieur le lieu où ces produits étaient construits. Jusqu’à maintenant.” Bill Weir, journaliste pour la chaîne américaine ABC, sait que son reportage intitulé “iFactory”, diffusé ce mardi dans l’émission Nightline, va faire du bruit.
Apple l’a en effet choisi pour être le premier reporter à mettre un pied et une caméra télé dans ses tristement célèbres usines chinoises de Foxconn, à Shenzhen et Chengdu, où plusieurs centaines de milliers d’ouvriers assemblent les produits vedettes de la marque à la pomme. Des usines où 18 salariés travaillant pour le compte d’Apple se sont également suicidés ces dernières années et qui sont régulièrement mises en cause pour les conditions de travail qui y sont imposées...
Si Bill Weir sait que certains critiquent déjà le choix d’ABC - qui appartient à Disney, une société dont le plus important actionnaire est la fondation de feu le fondateur d’Apple, Steve Jobs - pour réaliser ce reportage, il assure aussi que le géant de Cupertino lui a garanti un “accès sans réserve” à ses usines et aux salariés qui y travaillent.
Une ONG à la rescousse
“iFactory” montre, entre autres, des centaines de Chinois qui se pressent contre les grilles de l’usine de Shenzhen - aussi appelée "Foxconn city" car plus de 230 000 personnes y travaillent et y vivent - pour décrocher un contrat, même journalier, pour fabriquer le rêve "applesque". Bill Weir interroge également des salariés qui avouent être “totalement épuisés” par les rythmes de travail (près de 12 heures par jour, 6 jours par semaine). Mais surtout, Louis Woo, un ancien cadre d’Apple aujourd'huiconseiller du PDG de Foxconn, Terry Gou, reconnaît que les équipes d’ABC n’auraient jamais eu accès au site sans “une volonté d’Apple d’améliorer son image”.
Car ABC n’a pas décroché le convoité sésame de pouvoir se rendre dans les usines chinoises du sous-traitant Foxconn par hasard. Apple fait en effet face depuis le début de l’année à une intense campagne pour la fabrication d'“iPhone éthiques”. C’est d'ailleurs le nom d’une pétition en ligne qui a récolté près de 90 000 signatures.
Ce n’est pas la première fois que la Chine apparaît comme le volet sombre du rêve américain à la sauce Apple. Entre mars et juillet 2010, une série de 11 suicides dans les usines de Foxconn avait ému l’opinion internationale. La réponse d’Apple avait alors été de faire installer des filets sous les fenêtres des dortoirs, à Shenzhen...
Mais cette fois-ci, Tim Cook, le PDG d’Apple qui a succédé à Steve Jobs en août 2011, a décidé de s’emparer de la question et de lancer une vaste opération “transparence”. Si le reportage d’ABC en fait partie, la désignation, le 13 février, de l’ONG américaine Fair Labor Association (Association pour un travail équitable) pour mener une enquête “approfondie” sur les conditions de travail à Shenzhen et à Chengdu en est le volet le plus important. Cette ONG a envoyé une équipe de 30 personnes afin de recueillir les témoignages de 35 000 salariés chinois de ces usines. La Fair Labor Association publiera les résultats de son enquête et ses recommandations début mars. Son président, Auret van Heerden, a d’ores et déjà révélé que ses équipes avaient identifié une “tonne de problèmes” sur les sites incriminés.
Pas seulement Apple
Reste que si Apple est ainsi pointée du doigt, c’est essentiellement parce que, “en tant que leader sur le marché, l'entreprise est censée montrer l’exemple quant aux pratiques sociales et salariales”,explique au magazine américain Forbes Jordan S. Terry, président de la société de conseil financier Stone Street Advisors. “Les conditions de travail à Foxconn ne sont pas tellement différentes de celles qui existent dans la plupart des usines d’assemblage électroniques en Chine”, ajoute Geoffrey Crothall, porte-parole du China Labour Bulletin, la principale ONG de Hong-Kong de défense des droits des travailleurs, contacté par FRANCE 24.
Sans compter qu’à l’intérieur de l’usine de Foxconn, “rien n’indique qu’un employé qui travaille sur un produit Apple est soumis à des conditions de travail plus difficiles que l’un de ses collègues occupé à construire un produit d’une autre marque [À Shenzhen, outre Apple, Foxconn s’occupe également de Motorola, IBM ou encore DELL, NDLR]”, souligne Geoffrey Crothall.
Ce spécialiste pense également que l’opération “transparence” menée par Apple n’aura qu’un impact “limité” sur les conditions de travail sur les sites de Foxconn. “Depuis trois ans, le quotidien des ouvriers dans ces usines s’est amélioré, non pas grâce aux efforts des mutlinationales mais essentiellement grâce aux revendications des salariés eux-mêmes qui sont de plus en plus organisés face à leurs employeurs”, conclut Geoffrey Crothall.

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